Un territoire ancien

Ce changement modifie plus de deux siècles de stabilité des structures administratives : les communes de La Meignanne, de La Membrolle-sur-Longuenée, du Plessis-Macé et de Pruillé existaient depuis le 14 décembre 1789, date à laquelle l’Assemblée nationale constituante avait érigé les anciennes paroisses en communes.

Pourtant curieusement sur un temps beaucoup plus long, celui du millénaire, le cadre de la nouvelle commune n’était-il pas en gestation ? Ses limites extérieures, ses évolutions internes du Haut Moyen-Age à la Révolution ne préfiguraient-elles pas son aboutissement actuel ?

Entre forêt et rivière

Jusqu’à l’an mil la forêt recouvre la majorité du territoire de Longuenée-en-Anjou, la forêt de Longuenée n’étant que le prolongement de l’immense forêt des Echats qui s’étend sur des milliers d’hectares à l’ouest d’Angers. Longtemps la forêt est l’élément dominant du paysage : La « Membrolle » est à l’origine une « petite maison » dans la forêt, celle-ci arrive toujours au Plessis au début du XVème siècle, les loups y sont encore signalés en 1715 ! Les toponymes des métairies des Bois à La Meignanne, du Bois-Fleuri au Plessis témoignent de son avancée. La vie économique s’y concentre dans les clairières : exploitation du minerai de fer dans des forges rudimentaires par des chaudronniers et des armuriers (présence des scories dans les champs entre le bourg et la Brosse au Plessis par exemple), pacage des animaux (le prieur du Plessis a le droit de mettre deux cents porcs tout l’année dans la forêt de Longuenée entre le XIIème et le XVème siècle). C’est aussi un lieu de refuge en particulier au moment des invasions normandes.

Par contraste, les vallées sont des lieux de pénétration et d’échanges : si celle du Brionneau à La Meignanne apparaît d’une importance très mineure, celle de la Mayenne, où le bourg de Pruillé s’est installé, a un rôle commercial de premier plan. Sous l’empire romain, Angers, alors Juliomagus (« Le marché de Jules »), en raison de sa double confluence (Mayenne-Sarthe-Loir et Maine-Loire), est la clé de l’ouest gaulois par ses rivières et les voies qui les suivent au plus près ou sur les lignes de crête, comme la grande voie romaine Juliomagus-Condate (Angers-Rennes), ou sur l’autre rive celle d’Epinard à Châtelais. Sur la Mayenne, le port de la Roussière est un point stratégique : passage obligé pour le transport des marchandises, moulins à blé seigneuriaux, résidence d’une brigade de gabelous chargés de la répression de la contrebande du sel. En 1789, dans les cahiers de doléances, il est au cœur des préoccupations des habitants de… La Pouèze qui demandent-et obtiendront-une route de leur village à la Roussière en passant par La Membrolle pour le commerce du bois, du charbon de bois et de l’ardoise ; ceux de Pruillé placent en premier la suppression de la gabelle !

Trois paroisses nées à partir du XIème siècle

A partir du XIème siècle, les limites de l’actuelle Longuenée-en-Anjou sont fixées et correspondent à celles de trois paroisses nouvelles nées progressivement de l’évangélisation des populations et des défrichements. Regroupant trois communautés de fidèles autour de leur église et de leur cimetière, elles sont investies d’une forte identité aussi symbolique qu’administrative.

La fondation de l’église de Pruillé est datée de 1058. La première mention de celle de La Meignanne remonte à 1060. La Membrolle est citée pour la première fois en 1116.

L’église de Pruillé est le seul monument témoin de cette époque : bien que largement remaniée au XIXème siècle dans un style néo-gothique, ses ouvertures romanes apparaissent toujours sous l’enduit de la restauration. Les églises primitives de La Meignanne et de La Membrolle, au plan vraisemblablement voisin, ont été détruites pendant la Révolution.

A partir du XIIème siècle, les paroisses apparaissent dans les cartulaires des abbayes d’Angers, dont les églises (et leurs revenus, dîme notamment) sont les possessions : Saint-Serge pour La Membrolle et Pruillé, Saint-Nicolas pour La Meignanne.

Des bourgs un peu plus denses autour de l’église, quelques hameaux, les « tenures » des « vilains » liés à leur seigneur par un entrelacs complexe de propriétés et de droits souvent sur quelques arpents de terres, telles apparaissent alors ces paroisses.

Un fief seigneurial majeur

A la carte de ces trois paroisses ecclésiastiques, lieux du pouvoir spirituel, se superpose en effet une autre entité territoriale, celle d’un fief seigneurial majeur, celui du Plessis-Macé, lieu du pouvoir temporel, militaire et protecteur à l’origine, fiscal et judiciaire au fil des siècles, suzerain de vassaux parfois eux-mêmes puissants comme celui de La Guillaumière à La Meignanne ou de la Roussière alors à Pruillé.

Le château du Plessis-Macé est une des plus anciennes et des plus puissantes forteresses de l’Anjou. Ancien oppidum gaulois, à l’époque féodale, il forme avec « la ville du Plessis » un lieu fortifié dont subsiste le Châtelier, et qui abrite un prieuré confié à quelques moines bénédictins de Saint-Serge. Le seigneur et les habitants de « la ville » du Plessis sont paroissiens de La Meignanne.

L’enjeu ne paraît sans doute pas très grand jusqu’en 1135 : le château a sa chapelle, « la ville » son prieuré, chaque lieu a ses offices de proximité et le curé de La Meignanne y est encore chez lui.

En 1135, Rainaud II du Plessis, dit « Rainaud-le-Roux », petit-fils de Macé Ier du Plessis, obtint de l’évêque d’Angers, Ulger, qu’une partie de la paroisse de La Meignanne soit détachée pour créer une nouvelle unité paroissiale, dont l’église du prieuré Saint-Pierre du Plessis devient le centre. Cette opération explique encore aujourd’hui la présence du bourg du Plessis non loin des limites de l’actuelle commune « déléguée » de La Meignanne, aux Ruaux et à la Censerie.

La nouvelle paroisse suit les vicissitudes de son illustre centre : elle connaît le déclin au XIIIème siècle au point de disparaître en 1270 et de fusionner avec … La Membrolle (sans retour vers La Meignanne), quand les Du Plessis et les moines abandonnent les lieux ; château et prieuré sont incendiés par les Anglais pendant la Guerre de Cent Ans.

1473 : la fixation définitive des quatre paroisses

Au XVe siècle, Louis de Beaumont, seigneur du Plessis restaure le château, le château actuel. C’est un intime du roi Louis XI, un allié de poids pour le retour du duché d’Anjou du bon roi René dans le giron du royaume et la lutte face au puissant duché de Bretagne.

Paroissien de La Membrolle, il veut restaurer la paroisse du Plessis. L’évêque ne veut rien entendre. Louis de Beaumont traite directement avec le pape Sixte IV, qui par décret pontifical ordonne en 1473 la refondation de la paroisse du Plessis : par retour de ce qui lui avait été donné précédemment au détriment de La Meignanne et par coupe sombre dans la partie sud du territoire de La Membrolle. La menace d’excommunication dut être suffisante pour convaincre les habitants des Gats, du Moncelay ou de la Fresnaye d’aller désormais au Plessis, où l’église est reconstruite.

À la même époque, les Membrollais ayant perdu gros dans l’opération, par compensation et par un coup de billard à trois bandes, échangent avec Pruillé le Tertre contre la Roussière de façon à avoir accès à la Mayenne. Depuis lors, les quatre communautés vécurent heureuses…

Depuis plus de mille ans le château du Plessis-Macé en son centre, la rivière la Mayenne et la forêt de Longuenée à sa périphérie ont structuré les relations et les activités des hommes de ce territoire de l’Anjou, aujourd’hui éponyme de la forêt.

Si le passé répond de l’avenir, sa nouvelle unité administrative est aussi désormais le gage de son attrait et de son développement.

Introduction issue de la charte de Longuenée-en-Anjou

Rédaction de l’historique par Bernard BEAUPÈRE

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